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L’histoire que j’ai inventé dans ma tête

J’aime l’authenticité et la vulnérabilité. On pourrait en parler avec plein de jolis mots mais à la place, je vais vous raconter une histoire. Imaginez que vous sortez d’un RDV avec quelqu’un, vous lui dites « c’était super de te voir! » et en réponse, vous voyez qu’il roule les yeux vers le ciel et qu’il expire bruyamment avec énervement. Vous bloquez. Oh punaise. A l’intérieur de vous, une petite partie de votre cœur se fend. Vous rentrez chez vous en pensant: « j’ai surement dit un truc de travers, mais qu’est-ce que j’ai fait de mal, il ne m’aime pas (sensations de boule au ventre possible) » suivi par « bon et puis tu sais quoi, de toute façon je ne l’ai jamais aimé non plus! Je m’en fiche de ce qu’il pense. »

Pourquoi ?

Parce que quand quelque chose de difficile nous arrive (une conversation difficile, un regard froid, vous lisez un commentaire critique ou vous recevez un mail négatif) nous sommes neuro-biologiquement branchés pour créer du sens. Le cerveau a besoin de créer du sens derrière nos expériences. Et le cerveau reconnait la narration d’une histoire : début, milieu, fin. Ça le rassure. Le cerveau va donc, rapidement, créer une histoire pour mieux comprendre ce moment.

On pense que l’histoire sera rationnelle et posée – mais pas du tout. Parce que d’un point de vue du cerveau, ce sont nos émotions qui sont au volant! Les pensées et le comportement ne sont pas à l’avant de la voiture, même pas à l’arrière, ils sont dans le coffre en train de se demander– mon dieu, on va où, ça a l’air fou?!Et souvent, les émotions qui contrôlent notre cerveau sont la honte et la peur. Leurs messages préférés:

Qui est-ce que tu crois que tu es ?

Et

Tu n’es pas assez bien.

Et c’est là que j’ai envie de vous introduire un outil qui a changé ma vie : l’histoire que j’ai inventé dans ma tête.

Image: Buddha Doodles

Image: Buddha Doodles

L’histoire que j’ai inventé dans ma tête

Cette histoire, on la crée tous. Elle nous permet de passer d’une émotion floue et intense (comme quand vous lisez un mail négatif et votre cœur s’accélère, vos mains transpirent, votre vue se brouille) à une histoire plus construite. Sauf que cette histoire est souvent contrôlée par la peur : « Je ne suis pas assez bien, il me déteste, ça s’est mal passé » et puis « tu sais quoi si tu penses que tu es meilleur que moi, je t’emm****de« .

Bien sur, tout cela ne se passe *que* dans notre tête.

Le pouvoir de l’authenticité et la  VULNÉRABILITÉ

Brené Brown est une femme exceptionnelle qui fait des recherches sur la honte, la vulnérabilité, l’authenticité, le courage. Et elle s’est demandé qu’est-ce qui différenciait les personnes qui surmontaient les défis dans leur vie par rapport à ceux qui se laissaient abattre. C’est leur capacité à être authentique et vulnérable dans ce qui les bouleverse. Donc, à questionner et comprendre l’histoire qu’ils ont inventé dans leur tête après un moment difficile. Premièrement, 70% de ces personnes ont écrit cette première histoire énervée et paniquée. Puis ils se sont posées deux questions:

Comment je me sens ? (ou: mon dieu, qu’est-ce qui m’arrive, pourquoi je suis aussi tendu!)

La plupart du temps on ne sent pas ces émotions. On les bloque.  On les enfonce. On les anesthésie. Et parfois nous sommes bien meilleurs à faire à infliger de la douleur qu’à la sentir pour nous-mêmes (par exemple dire à quelqu’un après avoir été blessé par lui: et bien tu sais quoi, je t’emm**erde ) (NB: cet article sera en effet, particulièrement riche en astérix juteux).

Nous avons du mal à reconnaître et sentir nos émotions. D’après des études, la personne moyenne considère qu’elle connait et peut reconnaître 3 émotions en elle: content, triste, en colère (vé-ner !). Seulement 3, vous imaginez.

Donc la première étape, après avoir compris qu’on s’était inventé toute une histoire dans la tête, consiste à reconnaître ses émotions: qu’est-ce qui m’arrive ?

Qu’est-ce que j’ai besoin de savoir ?

Cette histoire qui te ferait mourir de honte si quelqu’un d’autre la lisait –  peut ressembler à ça :

***

Julie n’a pas répondu à mon mail. Je suis sure qu’elle ne m’aime pas. Et en même temps, qui est-ce qu’elle croit qu’elle est ? Elle pourrait faire des efforts. Elle est hypocrite. Je ne l’aime plus !

***

Cette première histoire est super importante. Elle te dit tout ce que tu ne sais pas (par exemple: pourquoi Julie n’a pas répondu à ton mail, peut être qu’elle est débordée?) et de quoi tu as vraiment peur (de ne pas être aimé, d’avoir besoin de l’approbation des autres pour être bien avec toi-même). Elle te dit quelle histoire tu es entrain de créer dans ta tête. Et selon ton paysage mental, ça oscille souvent entre « personne ne me comprend et ne m’aime » à «ils me font tous ch*** ils ne comprennent rien à la vie ». On part en guerre contre nous-mêmes ou contre les autres.

Il n’y a rien de plus dangereux que les histoires qu’on se raconte à soi-même. On s’assoit seul avec nos histoires emplis de doutes et de rancœur et le monde se renferme sur nous alors qu’en fait, en réalité, le monde est ouvert! Par exemple :

  • Les histoires sur notre créativité

On crée tous des choses au quotidien. Un article, un cours, une chanson, une photo, un site web, un concert, un objet de bricolage. Et parfois, on reçoit des retours négatifs ou pas de retour du tout. Souviens toi. Ce n’est pas parce que quelqu’un n’a pas compris quelque chose que tu as créé  que ça lui enlève sa valeur ou que ça réduit la tienne. Continue à créer, si ça vient de ton coeur :)

  • Notre capacité à être aimé

Par exemple, ton père ou ton ex-copain/copine t’a laissé tomber, tu commences à croire que tu n’es pas digne d’amour (même si tu caches cela sous des couches d’ironie ou d’humour). Ce n’est pas parce que quelqu’un n’a pas eu la capacité de t’aimer que tu n’es pas digne d’amour.

Que faire avec l’histoire ?

« L’histoire que je suis entrain de créer dans ma tête » n’est pas forcément une histoire que je vais partager avec la personne concernée. La plupart du temps, parce que le fait de l’avoir écrite, de se l’être appropriée nous indique les aspects de nous qui sont vulnérables (je me sens pas digne d’être aimé, je ne me sens pas légitime dans mon travail, ce que je fais est chiant, les gens n’apprécient pas mon travail, etc.). Et on peut juste – comme ça – décider de ne plus l’alimenter. Bye-bye histoire dramatique! 95% du temps, cette histoire est fausse, et vous le savez si vous avez déjà eu l’occasion de confronter l’histoire dans votre tête à la réalité.

Pour preuve, je vais vous donner un exemple d’une histoire que Brené raconte. Cela faisait 3 fois qu’elle sortait d’une réunion avec son équipe et à chaque fois une de ses collègues faisait des grimaces et des bruits d’exaspération en sortant. Elle s’est rendu compte que son cerveau avait commencé à créer une histoire dans sa tête : « mais tu sais quoi, si tu n’es pas contente de travailler ici, tu peux te barrer! ». Elle se sentait clairement sur la défensive. Alors elle est allée la voir pour lui dire :

« Hey, je peux te parler de quelque chose deux minutes ? Cela fait quelques fois que je te vois sortir de réunion, en faisant des bruits exaspérés et j’ai inventé toute une histoire dans ma tête comme quoi tu étais énervée par rapport au travail, est-ce qu’on peut en parler? »

Et sa collègue de lui répondre : « Oh mon dieu ! Ça fait trois semaines que j’ai commencé à prendre des cours de zumba et à chaque fois que je m’assois plus de trente minutes, j’ai ma hanche qui se bloque complètement à cause de la zumba! ça me fait un mal de chien ! »

Boum.

Brené était prête à nourrir une rancœur contre sa collègue, à s’imaginer qu’elle ne l’aimait pas elle (donc à souffrir aussi), tout ça à cause de l’histoire qu’elle avait inventé dans sa tête. Combien d’entre nous peuvent se reconnaître dans cette histoire?

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Conclusion

Nous créons tous des histoires dramatiques dans notre tête. Pas besoin de s’en vouloir pour ça. Mais une fois la vague émotionnelle passée, qu’est-ce qu’on peut faire ? La saison du printemps me donne toujours envie d’être plus légère et de moins prendre les choses au sérieux. D’autant plus, si ce sont des histoires qui n’ont aucun fondement mais qui nous font souffrir quand même. Quelle histoire tourne en boucle dans ta tête ? Qu’est-ce qu’elle t’apprend sur tes peurs et tes besoins ? Est-ce que tu es prête à l’écrire et à la laisser partir? Sois authentique et vulnérable avec toi-même. Et peut-être même, partage tes doutes avec la personne concernée.

Allège toi de cette histoire qui ne te sert pas. Il est temps! Il est temps :)

19 Réponses à L’histoire que j’ai inventé dans ma tête

  1. C’est tellement vrai ! Merci Cécile.

  2. en plein dans le mille… comme toujours ! (^-^) merci

  3. Astérix (!) au pays des Bisounours.

  4. Merci pour ce magnifique article qui sonne tellement vrai et qui permet de comprendre bien des choses.

  5. très très bel article, merci pour ta sincérité et tes pensées tellement humaines, ça fait du bien :)

  6. Très bel article qui m’a rappelé le discours si vrai et inspirant de Brown sur TED.com « The power of vulnerability »: à écouter absolument si vous ne le connaissez pas encore.

    Malheureusement il est très dur de faire part de vulnerabilité dans notre société. Et il est encore plus dur d’accepter sa propre vulnerabilité…. mais c’est sans conteste une des voies (/voix) du bonheur.

    Merci Cécile !

  7. Mon mari et moi nous disputons très souvent cela prend des proportions très difficiles à supporter, du moins pour moi. Il hurle hurle en me jettant toute sa hargne/haine à la figure, je veux répliquer mais sa voix couvre la mienne pour que je ne puisse pas en placer une. Et je monte le ton aussi et là, il me dit invariablement après avoir hurler tout ce qu’il peut, « je ne t’écouterai que lorsque tu te calmeras ».
    Cela me met réellement hors de moi, il a obtenu ce qu’il voulait que je m’énerve vraiment que je perde les pédales, tout ça devant notre fils auquel il dit « tu vois ta mère est folle ». Il me ressort ma réaction comme un plat froid dès qu’il peut.
    Pourquoi lorsqu’il me demande de me calmer alors que c’est lui qui hurle cela me met il hors de moi? Je crois que c’est tout ce que je ne veux pas être. J’ai été élevé dans le mépris des femmes, je suis une femme donc dans le mépris de moi. La prochaine qu’il me fera le coup, très bientôt donc j’essaierai de regarder cela de l’extérieur de moi.
    Cette histoire n’est pas tout à fait en rapport avec ton sujet Cécile mais elle m’a permis e me poser un peu, merci.

  8. Une autre partie de ton texte résonne pour moi, « ton père ou ton ex-copain/copine t’a laissé tomber, tu commences à croire que tu n’es pas digne d’amour (même si tu caches cela sous des couches d’ironie ou d’humour). Ce n’est pas parce que quelqu’un n’a pas eu la capacité de t’aimer que tu n’es pas digne d’amour. »
    Je n’ai jamais eu de lien avec mon père toutes mes tentatives ont échouées, la dernière, il y a une semaine aussi, c’était juste une question à laquelle il a répondu en disant ce qu’il fallait penser du sujet mais pas en me répondant à moi. Il m’a répété toute mon enfance « tu n’es pas aimable, tu n’es vraiment pas aimable ». Aimable employé plutôt dans le sens avenante qu’au sens littéral mais….cela était plusieurs fois par semaine, c’était dur…J’en pleure en l’écrivant.
    Aujourd’hui, confer commentaire précédent, mon mariage est une cata, c’est dur aussi et ça me renvoie au peu de considération que mes parents m’ont témoigné, pour toutes sortes de raisons.
    Je fais du yoga depuis bientôt trois ans et je tente d’expérimenter le datcha, le témoin neutre, plusieurs fois j’ai constaté l’efficacité de ce moyen, je progresse mais lorsque les émotions sont trop fortes, j’oublie la méthode.

    • j’ai aussi été touchée par ce passage, j’ai pleuré en le lisant et ça m’a permis de comprendre pourquoi je cherche à tout prix, à ce que dans mon couple ça ne fonctionne pas bien, alors que je suis sure d’être aimée par mon ami. C’est comme si je n’étais pas digne de cet amour.
      Merci Cécile de m’avoir permis de mieux me comprendre et de voir que je peux changer l’histoire que je me suis faite dans ma tête.
      Merci Elisa pour ton partage, car ça n’a pas dû être facile de l’écrire mais je pense que c’est essentiel de le faire. Ne pas rester seule.
      Demain, une nouvelle journée commence, tout est possible !

  9. Oui oui oui c’est complètement ça. Je suis arrivée à me défaire un peu de tout ça avec « les accords toltèques » qui m’ont grandement aidé. Je les ai écouté et lu plusieurs fois dans une période de grande sensibilité, j’en avais besoin à ce moment là, et cela m’a aidé à surpasser certaines souffrances. Il y a aussi un autre livre que j’ai lu et qui m’a aidé également à me « sauver » de moi-même : « Etes-vous votre pire ennemi? » d’Ana Sandrea. Pas mal du tout !

    Mais même si l’on se sent soulagé d’un poids, il faut toujours se méfier des rechutes…

  10. Cet article est tellement d’actualité! Parfois nous avons du mal a capter le monde sensible du fait des technologies et on en oubli peu etre l’essentiel.

  11. Hey bien moi c est mon quotidien de m en raconter des histoires il est grand temps que je prenne soin de mon cœur et avance …

  12. On s’y retrouve totalement ! C’est le combat du mental pour ne pas perdre sa place contre l’être de lumière que nous portons chacun en nous. L’écoute et le partage font partie intégrante de la vulnérabilité et de l’authenticité. Merci pour ce bel article !

  13. Merci, c’est tellement vrai cette histoire. Cela m’en fait prendre conscience, c’est un premier pas :)

  14. Marie-Pierre COURJEAU FOUSSADIER

    Plein d’évidences, bien sûr ! Merci pour tes éclairages simples, et bienfaisants :-)

  15. bjr cécile, cet article et vraiment tres ordonné mot par mot , et j sens qu’il parle a chaque etre , humaine sur tout , mais n’avons nous pas besoin de senssibilité pour porte a l’eveil ? en faite n’avais tu jamais ecris ou lis ou bien un jour penser a la senssibilté de maniere humaine et spirituelle? parle et ecris nous a peu sur se sujet cecile .
    merci et bien amicalement

  16. J’ai toujours un peu peur de laisser un commentaire sur un blog ou des vidéos YouTube, la communauté étant installée bien avant que je n’arrive mais des fois j’me tire les doigts de mon séant quand je ressens le besoin (pourtant je suis en phase enchanteresse !;)). J’ai découvert ton blog en me demandant depuis quand on mangeait du sucre raffiné, car j’ai appris qu’avant il se vendait en pain de sucre jusqu’à la fin du XIXeme siècle, tout ça parce que j’avais vu un pain de sucre et que je me suis demandé pourquoi on appelait ça comme ça !
    BREF. Disgression de fou juste pour dire Merci pour ce chouette contenu, étoffé, travaillé, inspirant et agréable à lire!
    Super article sur la lune rouge et les règles, passionnant ! Je vais m’empresser d’étudier ca de plus près. Article sur les 4 désirs tout aussi génial qui donne des bonnes pistes à ce que j’avais du mal à analyser en moi.
    Fin bref, j’vais arrêter ici sinon je ne vais plus tarir d’éloges!
    Bravo et merci pour ton travail. Bele découverte du jour !

    • Merci Maurine, je suis contente que tu aies laissé un commentaire :)
      Bienvenue dans cette communauté, j’espère que tu t’y sentiras toujours soutenue.

      Chaleureusement,
      Cécile

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